Elfiron s'empourpra légèrement et répondit à Lucrezzia :
"J'ai commencé mes recherches il y a 20 ans, mais ce n'est que récemment que j'ai réussi à le mettre au point presque entièrement. Il ne faut pas trop en boire car au delà de ses effets premiers il peut, chez certaines personnes, provoquer une accoutumance et des réactions...hum...comment dire légèrement aphrodisiaques."
Devant le regard étonnée de la magicienne il continua :
"Mais je vous rassure, cela n'arrive qu'au deuxième ou troisième verre et les esprits forts résistent très bien à l'accoutumance, vous ne devriez pas en souffrir. Je travaille à éliminer ces derniers effets secondaires mais je ne sais pas combien de temps cela prendra t-il"
Il laissa un silence tout en contemplant la bouteille contenant son breuvage et reprit.
"De toute façon je ne pourrais bientôt plus faire mes expériences, les ingrédients me manquent et cette bouteille est la dernière en ma possession.
Waldorf eut un regard surprit :
"Mais, tu ne m'avais pas dit ça, tu aurais du la garder..."
Elfiron
"Sans toi Wal, je n'aurais jamais pu produire cette bouteille je te devais bien ça non !!! et puis quoi de plus gratifiant que de voir le sourire d'une aussi jolie femme buvant ma création..."
Devant le regard interrogateur de la magicienne il regarda Waldorf et poursuivit :
"Tu ne lui as pas raconté ?"
Waldorf :
"Elfiron...heu...Lucrezzia et moi n'avions pas dinés ensembles depuis un
moment..."
Elfiron :
" Ah je comprends, eh bien t'es un idiot...hihihi..."
Elfiron regarda Lucrezzia puis indiqua du menton Waldorf:
"Ce gros nigaud qui vous a délaissé m'a sauvé la vie, d'un autre coté si il ne vous avait pas délaissé il n'aurait surement pas été présent pour me sauver la vie...enfin bref..."
Il prit la main de Lucrezzia comme si il était ravi de narguer le grand guerrier et continua
"Je suis un ancien commis aux cuisines su roi Victor, j'ai gravi les échelons un à un, au mérite, et je me suis finalement retrouvé second cuisinier du Roi. Malheureusement pour moi le chef cuisinier, Cameron, avait un bien piètre talent mais une belle "gueule" et il était protégé par une des favorites du Roi.
Du coup tout le travail me revenait tandis qu'il récoltait la gloire et les honneurs. L'accès aux cuisines et aux garde-manger du Roi suffisaient amplement à mon bonheur à cette époque. Je décidais de concocter mon fameux breuvage et j'y passais la plupart de mes nuits.
Un soir que je cherchais des ingrédients dans un des garde-manger j’entendis des rires dans la cuisine, prenant un couteau je tentais d’apercevoir de quoi il retournait. J’aperçu Cameron en compagnie d’une fort jolie femme, ils riaient tandis qu’ils se poursuivaient entres les fourneaux. Je vous laisse imaginer la suite...
Je tentais de sortir des cuisines sans me faire remarquer mais ma tête heurta une casserole pendue à son crochet. Le bruit fut assourdissant et, en moins de temps qu’il ne faut pour le dire, une torche m’éclairait.
Je n’oublierais jamais le regard de Cameron, un mélange de stupeur et de fureur. Il me dit :
« j’ignore ce que tu fais la mais tu n’as rien vu, c’est compris…allez hors de ma vue »
Je ne me fis pas prier mais tout en m’éloignant j’entendis la jolie femme s’entretenir avec mon chef et ce que je saisis me glaça le sang, elle lui avait dit :
« c’est lui ou toi, si il parle nous sommes morts tous les deux, mon mari et le Roi ne plaisante pas avec l’adultère, tu veux prendre ce risque…il ne doit pas voir le jour se lever !!!! »
Je fus prit d’une peur panique et je m’enfuis sans demander mon reste. Persuadé que Cameron et cette jeune femme me ferait pourchasser jusqu’à ma mort je galopais aussi vite que possible aux frontières du royaume. Je parvins finalement à Itix dans un piteux état mais vivant. Je n’osais m’aventurer très longtemps en ville de peur de me faire reconnaitre, aussi je décidais de m’installer dans les bois environnants.
Après quelques mois, je commençais à reprendre espoir, pensant que plus personne n’était à mes trousses je revins à Itix et me fis engager comme commis dans cette taverne. Je repris la confection de mon breuvage à mes heures perdues mais le garde-manger de la taverne n’avait rien à voir avec ceux des cuisines du roi Victor.
Mon infortune me désespérait mais j’étais en vie, je fis donc contre mauvaise fortune bon cœur. C’est à ce moment la que j’ai rencontré Waldorf"
Il se tourna vers le guerrier en lui faisant un clin d’œil et poursuivit :
"C’était un habitué de la taverne, surtout le soir, il buvait beaucoup et tentait visiblement d’oublier quelque chose par la boisson. Mais depuis quelques jours il semblait parfaitement sobre et il se mit à bougonner devant le ragout qu’on lui servait"
Il se tourna vers Lucrezzia et continua
"Remarquez, il n’y avait rien d’étonnant à cela, le cuisinier…pftttt…enfin si on pouvait l’appeler comme ça, il avait du apprendre la cuisine dans une forge !!! Je n’avais jamais parlé à un des clients auparavant mais tout en balayant la salle je m’approchais de sa table et lui dit en marmonnant pour ne pas que cela s’entende trop :
« Le ragout n’a pas l’air de vous plaire, voudriez que je vous amène quelque chose d’autre »
Waldorf fut légèrement surprit de voir que j’avais le don de la parole, mais d’un geste repoussa le ragout et hocha de la tête.
Je repartis en cuisine et, sans me faire remarquer, je lui préparais un plat de ma composition et lui servit. Il me regarda étrangement mais commença à manger. L’étonnement que je lus sur son visage valait tous les remerciements du monde. Il termina son repas et me fit un petit signe discret.
Je m’approchais et il me demanda qui avait fait ce plat. Quand je lui répondis que c’était moi il plissa les yeux et me dit :
"Tu devrais laisser ton balai et te mettre derrière un fourneau, il y a bien longtemps que je n’ai pas mangé quelque chose d’aussi bon, même la cuisine de notre château n’est pas aussi bonne."
Je répondis que cela ne tenait pas qu’à moi, cela le fit sourire, il se leva et se dirigea vers l’alcove ou se pavanait le patron de la taverne. Je ne saisis pas la conversation qu’ils ont eus tous les deux mais je vis presque courir
vers moi le patron qui me dit :
"toi !!!, désormais tu bosses aux cuisines"
Surprit je regardais Waldorf au bout de la salle qui me fit un petit signe de tête avant de sortir de la taverne.
A partir de ce moment je retrouvais le gout de la vie, je réorganisais la cuisine, l’approvisionnement et tous les menus. La taverne refusait désormais du monde pour déjeuner et diner. Waldorf avait sa table réservée et il venait déjeuner tous les midis et tous les soirs, il avait demandé des repas les plus équilibrés possibles et ne buvait plus du tout. Il avait perdu tout l’embonpoint que je lui connaissais et semblait désormais dans une forme du tonnerre.
Mais ce fut à ce moment que tout bascula…j’étais seul dans la taverne au milieu de l’après midi quand quatre hommes entrèrent, ils me dévisagèrent et un mauvais pressentiment m’envahit. Ces hommes se postèrent aux
issues avec un rictus qui me glace le sang. Puis la porte s’ouvrit et je vis entrer Cameron. Il se dirigea vers moi et dit :
"Elfiron, Elfiron, tout ce chemin pour te retrouver, remarque il m’a suffit de savoir qu’une taverne des frontières extérieures servaient, soit disant, les meilleurs repas du royaume pour savoir ou tu étais…amusant de penser que c’est ta cuisine qui va te perdre…allez ne fais pas d’histoire et cela sera rapide !!!"
Je n’avais aucun moyen de fuir et les hommes de Cameron me saisirent et m’entrainèrent vers la porte de derrière. J’avais beau réfléchir à toute vitesse je ne voyais aucun moyen de fuir. Ils me poussèrent dans le bois
qui jouxtait la taverne et me mirent à genoux, ma dernière heure était
arrivée !!! »
A ces mots Elfiron eut du mal à parler, il se servit un verre le vida d’un trait et poursuivit :
"j’entendis le bruit d’une lame sortant de son fourreau tandis que l’un des hommes approchait, cela dura une éternité et, comme sortit de nulle part, j’entendis la voix de Waldorf.
"C’est une petite fête entre amis ou on peut se joindre à vous..."
L’un des hommes s’avanca vers Waldorf tout en lui disant :
"Va donc voir ailleurs si on y est, tu te rendras service..."
"C’est une idée mais voila vous venez de troubler mon entrainement, alors je me dis qu’après tout vous feriez aussi bien l’affaire que mes mannequins de bois !!!"
Tout en parlant, Waldorf avait avancé pour se mettre entre moi et le plus proche des quatre hommes de telle sorte que je n'étais plus menacé directement. Il prit une posture guerrière, invitant les hommes d’armes à venir se battre. Avec un rictus mauvais les quatre hommes se dispersèrent autour de Waldorf.
"Elfiron, dégage de la, reste pas dans mes pattes !!!"
Les quatre mercenaires, d’un commun accord attaquèrent en même temps. Il est très difficile pour moi de décrire le combat mais on aurait dit un ballet sanglant. Waldorf ne sortait pas d’un cercle imaginaire tout en tournoyant sur lui-même. Il repoussa trois ou quatre fois les assaillants et d’un coup se redressa et clama haut et fort :
« Cela suffit, vous avez eu la possibilité de cesser le combat à plusieurs reprises, je ne joue plus !!! »
Le premier reçut un coup d’épée en plein cœur, le second fut décapité, le troisième fut éventré et il brisa la nuque du quatrième. Waldorf se pencha sur le dernier corps tandis que je me rapprochais. Soudain un léger bruit me fit tourner la tête et j’aperçus Cameron un peu plus loin qui bandait un arc en direction de Waldorf. Il ne m’avait pas vu, tout concentré sur sa visée. C’en était trop pour moi je fis aussi vite que possible, ramassait une grosse
branche et l’abattit sur sa tête au moment ou il tirait. Le coup partit et je vis la flèche passer à quelques centimètres de la tête de Waldorf et se planter dans l’arbre voisin.
Je lâchais la branche tandis que Waldorf me rejoignait, je n’osais regarder le corps de Cameron. Waldorf me dit :
"Eh bien mon ami tu ne l’as pas raté, il ne viendra plus t’importuner celui-là"
L’adrénaline ne faisait plus effet et mes jambes se dérobaient sous moi, Waldorf me raccompagna à la Taverne ou je lui racontais toute mon histoire. Il me rassura en me disant que mes ennuis étaient terminés pour le moment et qu’il s’occuperait de ceux à venir. Il me proposa de devenir un Exilé mais j’aimais trop ma liberté.
Quelques jours après le patron de la taverne voulut vendre pour retourner à Ascalon, Waldorf m’avança l’argent pour que je puisse l’acheter et m’installer comme je le souhaitais. Il me donna aussi de l’argent pour me procurer les ingrédients qui me manquaient pour terminer ce nectar.
Malheureusement, on ne les trouve plus sur le marché, c’est pourquoi je vous disais que je ne pourrais bientôt plus faire mes expériences.
Voila vous savez tout, ou presque de moi, de moi. Tandis que moi j’ignore tout de vous belle dame"